Dans un monde où les marchés financiers sont plus interconnectés que jamais, nombreux sont les investisseurs qui, paradoxalement, concentrent encore leurs portefeuilles sur leur propre marché national. Ce phénomène, appelé biais domestique (ou home-country bias), est courant, notamment chez les investisseurs particuliers. Il désigne la tendance à surpondérer les actions de son pays d’origine au détriment d’une exposition mondiale plus équilibrée.
Les racines du biais domestique
Ce biais est principalement d’origine psychologique. Investir dans des entreprises connues, implantées localement, procure un sentiment de confort et de contrôle. Les marques familières, la langue commune, la proximité géographique ou encore la couverture médiatique renforcent cette impression de sécurité. Les investisseurs peuvent aussi supposer, souvent à tort, qu’ils ont un « avantage d’information » sur leur marché local.
Cependant, cette préférence nationale n’est pas toujours rationnelle. Plusieurs études ont montré que même dans des économies développées avec des marchés financiers sophistiqués, les portefeuilles privés présentent une forte concentration domestique. Par exemple, aux États-Unis, des données de Vanguard ont révélé que les investisseurs américains détiennent en moyenne plus de 75 % d’actions locales, alors que les États-Unis ne représentent qu’environ 60 % de la capitalisation boursière mondiale. En Europe ou au Japon, l’écart entre l’exposition nationale et le poids réel du pays dans l’économie mondiale est souvent encore plus marqué.
Risques d’une concentration domestique excessive
En se concentrant trop sur leur propre pays, les investisseurs s’exposent à des risques systémiques spécifiques : ralentissement économique local, instabilité politique, politiques monétaires nationales ou catastrophes naturelles. Même dans les grandes économies, ce manque de diversification peut entraîner une volatilité accrue du portefeuille et une performance moindre à long terme.
Par ailleurs, ignorer des marchés dynamiques à l’étranger — comme certains segments technologiques asiatiques ou les valeurs industrielles émergentes — revient à passer à côté d’opportunités de croissance majeures.
Mesurer et corriger son biais
La première étape pour atténuer ce biais est de le mesurer concrètement. Il s’agit de comparer la part de son portefeuille investie dans les actions nationales avec leur poids dans les indices mondiaux (par exemple MSCI World ou MSCI ACWI). Des outils en ligne ou fournis par certains courtiers permettent de visualiser rapidement cette répartition.
Ensuite, il est utile de définir une cible plus équilibrée. Cela ne signifie pas nécessairement copier un indice mondial, mais plutôt tendre vers une répartition plus cohérente avec ses objectifs de diversification et de gestion du risque.
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Techniques de rééquilibrage progressif
Rééquilibrer un portefeuille peut se faire en plusieurs étapes, notamment par des investissements programmés dans des actifs internationaux ou via des arbitrages réguliers lors de nouveaux apports de capital. L’idée n’est pas de vendre brutalement toutes les positions domestiques, mais d’ajuster la composition dans le temps, tout en respectant sa tolérance au risque.
Pour cela, certains investisseurs utilisent des benchmarks personnalisés, intégrant à la fois une composante locale et mondiale, afin de mieux suivre leur progression vers un portefeuille diversifié globalement. D’autres intègrent des seuils de rééquilibrage automatiques à leur stratégie.
Attention à l’excès inverse
À vouloir trop corriger, on risque aussi de tomber dans un excès d’exposition internationale mal maîtrisé. Investir à l’étranger expose à d’autres types de risques : devises, régulations, fiscalité, illiquidité ou pratiques comptables divergentes. Il est donc essentiel de s’informer sur les marchés ciblés et de comprendre les produits utilisés.
Certaines juridictions imposent également des contraintes réglementaires sur les investissements internationaux, notamment en matière de fiscalité ou de reporting. En France, par exemple, les revenus de dividendes étrangers peuvent être soumis à une retenue à la source, partiellement récupérable selon les conventions fiscales. Il convient donc de consulter un conseiller pour adapter sa stratégie à sa situation personnelle.
Vers une approche plus globale et équilibrée
Comprendre le biais domestique est un premier pas vers un portefeuille plus robuste et résilient. En élargissant ses horizons géographiques, l’investisseur augmente ses chances de capter la croissance là où elle se manifeste — que ce soit en Californie, à Séoul ou à Bangalore — tout en réduisant sa dépendance aux cycles économiques nationaux. L’objectif n’est pas de fuir son marché local, mais de l’intégrer dans un ensemble plus large, plus stable et potentiellement plus performant.